Par l'équipe de bi… | 7:08 PM EST, jeu novembre 28, 2024

Une communication thérapeutique 

Le tutoiement des résidents constitue l’écart le plus fréquent, observé dans 46 % des cas. Il est suivi par l’absence de recherche d’un consentement éclairé, qui concerne 26 % des situations. Cette dernière pratique inclut le fait de ne pas solliciter l’avis des résidents ou de ne pas leur fournir d’explications sur les soins qui leur sont prodigués. Enfin, 10 % des cas relèvent d’un usage d’un ton sec ou cassant de la part des soignants lorsqu’ils s’adressent aux résidents.

« Tutoiement régulier, langage irrespectueux, non recherche de consentement »
Ces comportements témoignent d’un excès de familiarité [22]et de l’absence de considération pour les résidents faisant partie des indicateurs de maltraitance psychiques ou morale.
Par ailleurs, si certaines formes de communication verbale ou non verbale deviennent des habitudes, il y en a d’autres qu’on peut considérer comme une réponse des soignants face à ce qu’ils pourraient considérés comme de la violence de la part des résidents qui ont parfois des troubles cognitifs.
Dans ces situations Nathalie et Annick propose plutôt d’accepter la violence des résidents comme l’expression de la souffrance de la maladie et leur apporter de préférence « une réponse thérapeutique » [25] tout en évitant l’excès de familiarité et en recherchant toujours le consentement éclairé.
 

Le respect de l'organisation établie

19 %, déclarent ne pas respecter les consignes de la fiche de tâche. 29 % ne respecte pas les horaires de pause défini, suivi des soignants qui gèrent seuls leurs difficultés avec les résidents, soit 19 %. Par ailleurs, 10 % ont déclaré s’être sentis exclus de l’équipe. 

Ces pratiques nous amènent à nous interroger sur comment motiver les salariés à fin qu’ils puissent respecter les rituels de l’organisation ? A regarder où se trouvent les zones d’incertitudes dans les fiches de tache ? Devrait-on repenser les fiches de taches ? Les plans de soins ? une plage horaire consacré à la traçabilité ?
A penser aussi sur comment arriver à fédérer une équipe en tenant compte de la pluri culturalité ? Et finalement à repérer les comportements déviants face au changement dans l’organisation ?
 

Le respect du droit au confort du résidant

Après la communication et le respect de  l’organisation des soins, le 3ème écart observé concerne le respect du confort du résident. Les indicateurs évalués étaient d’abord la réponse à l’appel malade dont 17 % des participants ont déclaré n’avoir pas répondu de façon régulière contre 27% qui ne l’ont pas fait rarement. Par ailleurs, une partie non négligeable des soignants a déclaré avoir l’habitude de mettre la sonnette hors de portée, de poser des contentions non prescrites ou de ne pas pouvoir identifier, à certaines occasions, un résidant qui serait en détresse.

Le mot confort se réfère à tout ce qui contribue au bien-être du résident. C’est aussi la tranquillité psychologique, intellectuelle, morale obtenue par le rejet de toute préoccupation (Larousse) .
Le stress psychologique est-il évité au résident au quotidien en ne l’inquiétant pas inutilement par des discussions souvent plus anxiogènes que compréhensibles ?  Par exemples des discussions médicales entre professionnels dans sa chambre.


La lumière dans les yeux, le bruit la nuit sont-ils évités au maximum ? est-ce que la pose de contention se fait toujours sur prescription ou par suite d’une délibération pluridisciplinaire. C’est de même quand on met la sonnette hors de portée, ou quand le délai de réponse de la sonnette est dépassé. Dans notre expérience nous recevions des rapports du logiciel qui trace automatiquement le délai de réponse surtout la nuit dépassant une heure de temps. Pourquoi ce si long délai ? Pourquoi la nuit ? Le management de proximité devrait essayer de répondre à ces questions et mettre en place des plans d’actions.
 

Le respect du droit à la confidentialité  du résidant

En ce qui concerne le respect de la confidentialité, un tiers des soignants déclare avoir discuté des données médicales des résidents dans le couloir et avec d'autres résidents.

Les EHPAD étant médicalisé, tout le personnel soignant mais aussi des agents administratifs sont soumis au secret professionnel ou plus précisément le secret médical. Ce dernier « couvre tout ce qui est venu à la connaissance de l’acteur dans l’exercice de sa profession, c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris. 

 

Le respect du droit  à la prise en charge de la douleur

Bien que les soignants déclarent très rarement qu’ils ne prennent pas en compte la douleur d’un résident ou transmettre l’information, il y a quand même 10 % d’entre eux pour qui cela arrive régulièrement de ne pas la tracer contre 33% qui ne le fait pas rarement.

La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé reconnaît le soulagement de la douleur comme un droit fondamental de toute personne. Ainsi, améliorer la prise en charges de la douleur, la formation des professionnels (initiale et continue), développer la prise en charge non pharmacologique et structurer la filière de soin de la douleur sont les 4 axes du programme national de lutte contre la douleur. Par ailleurs au près des soignants, la matérialisation de cette stratégie se résume en un mot « La traçabilité », outil au service de la qualité et de la sécurité des soins. Ainsi, la traçabilité constituera la seule preuve pour les auditeurs et les contrôles des ARS.

 

L'implication / L'application dans les soins, au signalement des signaux de maltraitances

6 % des participants ont déclaré avoir fait preuve de négligence dans les soins de façon régulière, contre 26 % qui l’avouent rarement. Par ailleurs, les soignants qui évitent régulièrement d’utiliser l’outil de signalement des événements indésirables (EI) — soit par peur de dénoncer, soit parce qu’ils ne savent pas comment l’utiliser — représentent 7 %, tandis que ceux qui l’évitent rarement sont 26 % et 13 %, respectivement 

Nous traitons de l’implication du personnel soignant ici à la fois au sens du professeur Patrick Legros et en termes de leur responsabilité d’être vigilant et d’alerter au moindre doute.
Dans son article, « l’implication au travail face à la dépendance accrue en EHPAD » le professeur P. Legros définit l’implication au et dans le travail. Nous présentons ci-dessous un extrait :
« L’implication « au » travail relève du choix de l’acteur [du personnel soignant] de réaliser pleinement la tâche qui lui est dédié ; elle peut se mesurer par sa productivité, son faible absentéisme et ses activités désintéressées (une forme de bénévolat qu’il considère comme faisant partie de sa fonction) ;
– l’implication « dans » le travail appartient à une seconde catégorie que l’on peut rapprocher de ce que Blood, à la suite de Max Weber, qualifie d’ « éthique protestante ». Cette fois, le travail est perçu comme une fin en soi et un miroir valorisant de ses capacités. Là encore, l’individu fait plus que ce qui est attendu de lui, en termes de temporalité et de quantité notamment, mais, cette fois, parce que le travail n’est pas seulement une valeur en soi : il occupe une place fondamentale de l’existence » [26]

Ainsi, pour le soignant se montrer impliquer dans son travail tel qu’explique P. LEGROS est déjà une façon d’être bienveillant et de participer dans la lutte contre la maltraitance en faisant tout simplement le choix de réaliser pleinement sa tâche tout jouant le rôle de lanceur d’alerte quand il est témoin d’un acte de maltraitance.
 

Le respect du droit à l'intimité et à la dignité du résidant.

En examinant le respect de l’intimité et de la dignité, on constate que, 44% des participants ont déclaré ne pas frapper de façon régulière à la porte avant de pénétrer dans la chambre des résidents. De plus, dans un tiers des cas, le résident est soit resté entièrement nu pendant la toilette ou la porte est restée ouverte pendant les soins.


Il s’agit de l’une des obligations de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, une obligation qui doit être respectée dans toutes les activités de la vie quotidienne. Comme l’indique le CGLPL [27], « dans l’accomplissement des gestes les plus banals et pour la satisfaction des besoins les plus élémentaires, l’institution en question assume à cette fin la responsabilité de définir, d’organiser et de mettre en œuvre les moyens d’y parvenir ».

Ces trois indicateurs, évalués pour cette modalité, ne représentent que la partie visible de l’iceberg. Pourtant, le respect de l’intimité et de la dignité des personnes accueillies doit être assuré dans divers aspects de la vie quotidienne, tels que les besoins élémentaires, l’hébergement, l’hygiène et la restauration.

- Besoins élémentaires : il est nécessaire de garantir un espace suffisant et adapté à l’état de santé des résidents, de leur permettre la liberté d’aller et venir, de leur offrir un accès immédiat au personnel en cas de besoin, de leur fournir des vêtements appropriés, de s’assurer qu’il n’y a pas de vidéosurveillance dans les chambres, et de mettre à leur disposition un moyen de signaler tout problème.

- Hébergement : le respect des normes de sécurité, d’hygiène et de confort est essentiel. Il faut également faciliter la prise des repas hors de la chambre et veiller à ce que la literie soit régulièrement renouvelée.

- Hygiène : il est important de maintenir les lieux en bon état d’entretien, de maintenance et d’hygiène. Les résidents doivent avoir un accès libre à des toilettes dans des conditions respectant leur dignité, ainsi qu’à des produits d’hygiène adaptés à leur genre. Ils doivent aussi pouvoir prendre soin de leur linge et de leur apparence.

- Restauration : les résidents doivent recevoir une alimentation variée, tenant compte de leur âge, de leur état de santé, de leur condition physique, de leur religion et de leur culture. Trois repas quotidiens doivent leur être proposés à des intervalles réguliers et aux horaires d’usage, en quantité suffisante et à une température adéquate. De plus, l’accès à l’eau potable doit être possible à tout moment, sans limitation de quantité et dans des conditions respectant leur dignité.

Ainsi, il est clair que pour respecter la dignité des personnes accueillies, chacun doit jouer son rôle, qu’il s’agisse des institutions, des soignants ou des instances de contrôle. Ne serais ce que par ce qu’un jour nous serons ou nous pourrons tous être à leur place. Comme l’a souligné Philippe Combessie dans Sociologie de la prison, « tout ce qui abaisse la dignité d’un homme rejaillit sur les individus qui y coopèrent, sur l’institution qui le tolère, et sur la société qui l’accepte et qui, pour ce faire, l’occulte ». [28]

En effet, abaisser la dignité des résidents ne reste jamais sans conséquence. Pour les soignants, cela peut entraîner une perte de confiance de la part des résidents et de leurs proches, ainsi qu’une dégradation de leur propre éthique professionnelle. 
 

Favoriser la préservation de l'autonomie 

Si 35% des soignant déclare avoir rarement ignoré la capacité des résidents et fait à leur place, il y a 10% des soignants qui le font de façon régulière. Par ailleurs 13% ne tiennent pas compte des difficultés des résidents, troubles cognitifs, auditifs, oculaires, dépendance physique et 3% déclare avoir préféré poser des protections au lieu d’accompagner la personne aux toilettes de façon régulières et plus d’un tiers des soignants le font de façon occasionnelle.

Le principal motif d’entrée en institution est la perte d’autonomie. Bien que ces dernières années les personnes âgées entre en EHPAD de plus en plus dépendantes grâce surtout aux politiques de maintien à domicile, on peut observer que dans le profil de la population accueillie des institutions participantes à l’étude, qu’il y a une bonne proportion de résidents GIR 2 à GIR 4 
D’où le rôle important des soignant dans l’aide à la préservation de l’autonomie. 


L’autonomie est un des derniers stades de la liberté de chacun, et par conséquent est à préserver au maximum et au quotidien.  La préservation de celle-ci se fait dans les gestes de la vie quotidienne et sans cesse. Il apparaît donc important que les acteurs s’interrogent sur leurs participations à la préservation de l’autonomie des résidents. Est-ce que nous favorisons les déplacements aux rythmes des résidents ? est-ce que nous prenons en compte leurs goûts, habitudes et les capacités pour la restauration ? est-ce que nous saurions identifier leurs moments de détresse ? est-ce que nous favoriserions leurs autonomies en privilégiant le « faire faire » plutôt que le « faire à la place de ».

 

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